Mahelys

Dans la pénombre et la sécurité de sa chambre, Mahelys allume une bougie et fait brûler un bâtonnet d’encens. Elle laisse glisser sa robe a ses chevilles, ouvre le tiroir de sa petite table de nuit et en sort un épais journal.

Tout en l’ouvrant, elle s’assoit sur sa couche et prend une plume sur la table.

Elle hésite un moment… Caressant sa joue avec la plume, elle revient à la première page de son journal et commence à le feuilleter. Les premières feuilles sont jaunies par les années.


« Ce matin, Étoilée et moi nous nous sommes enfuies de la maison ! Elle avait un peu peur comme d’habitude, mais à force d’insister elle a fini par me suivre !

On a passé la journée à chercher des fleurs et à se cacher derrière les arbres dans la forêt d’Ashenvale. On a même vu un ours passer… J’ai voulu aller essayer de lui parler mais Étoilée m’a retenue, elle disait qu’il serait trop dangereux et qu’on ne pourrait pas l’apprivoiser… Quelle dégonflée…

Ensuite, on est passées dans une clairière pas loin d’Astranaar… Là une sentinelle nous a vues, elle est venue nous chercher et nous a ramenées à la maison en nous tirant les oreilles !.... Je revois nana nous attendant sur le pas de la porte d’entrée, elle était pas contente… Mais elle nous a quand-même serrées dans ses bras très fort… Je ne comprendrai jamais notre mère !!!

Bien-sûr à table, ada nous a fait la morale… comme quoi c’est dangereux, qu’on ne doit jamais sortir seules, on ne sait jamais ce qui peut nous arriver, patati, patata… Il avait l’air tellement furieux, je suis sûre que les voisins l’ont entendu crier ! Si on ne peut même plus cueillir quelques fleurs dans la forêt… »

Mahelys a un léger sourire tandis qu’elle continue de parcourir son journal.

Mahelys s’arrête au hasard sur une autre page..

« Ada est rarement à la maison. Quand il est là, Étoilée et moi faisons de notre mieux pour qu’il fasse attention à nous, c’est à celle qui arrivera à l’intéresser un peu… Mais il ne nous parle presque jamais.

Et voilà que la semaine dernière, il m’a emmenée avec lui en voyage !
Je sentais que quelque chose allait arriver parce que ça faisait plusieurs jours qu’il nous observait ma sœur et moi..

Un matin, il m’a réveillée très tôt et m’a demandé de le suivre… Il a loué un griffon chez le maître de vol d’Astranaar et m’a fait monter dessus, devant lui… Je volais !! Quelle impression de liberté !

On a atterri à une ville nommée Auberdine. Mon père a acheté des provisions et nous sommes partis sur la plage, puis dans la forêt

Il m’a appris toutes sortes de choses comme guérir des animaux empoisonnés, soigner de petites blessures, faire passer des lénerjies vitales – je ne sais pas trop ce que c’est mais ça fait du bien aux gens – et bien d’autres choses.

Il dit que la Nature coule en moi comme de la sève. Je me suis sentie vivante mais je n'ai pas très bien compris ce qu’il voulait dire…

Enfin, j'ai beaucoup appris avec lui.. Il dit qu'il m'a choisie parmi les enfants d'Astranaar parce que j'aime aider les autres, mais aussi parce que j'ai hérité d'un peu du vert émeraude de ses cheveux, presque autant que ma soeur.. ça avait l'air important. D'ailleurs, à l'heure qu'il est, Étoilée doit être verte de jalousie.. »

Une dizaine de pages plus loin, Mahelys remarque une écriture inhabituelle, les mots ont été inscrits à la va-vite, presque indéchiffrables.


« C’est AFFREUX ! J’écris depuis une cachette dans la forêt.. Je suis avec ma sœur qui sanglote à côté de moi, l’air est froid et humide, je suis glacée.. j’ai à peine la force de tenir ma plume.. il faut que j’écrive, il le faut pour ne jamais oublier

Notre belle ville vient d’être décimée, il n’en reste plus rien !... Tout s'est passé à la vitesse de l'éclair, des silhouettes humanoïdes monstrueuses sont sorties de partout en hurlant dans une langue horrible, elles nous ont encerclés et les sentinelles n’y ont vu que du feu !

Dans la horde des attaquants, certains avaient l’air de morts revenus dans notre monde, ils étaient animés d’une folie meurtrière terrible !.. Il y avait des bêtes géantes avec des cornes, elles faisaient trois fois la taille de notre père au moins… Ada.. Il a essayé de nous protéger Étoilée et moi mais il a disparu dans la cohue, impossible de le retrouver

Nous avons fui toutes les deux jusqu’au Puits de Lune que notre mère gardait avec des Filles de Cénarius. En arrivant au Puits, on est tombées sur une scène que je ne pourrai jamais oublier.. nana était étendue sans vie sur une marche du Puits
*l’encre bave encore plus à cet endroit, de nombreuses larmes ont séché sur le journal* »

Des gouttelettes tombent sur le papier et viennent se mêler aux traces séchées. Mahelys pose le journal sur la table de nuit et enfouit son visage dans son oreiller.

Le journal de Mahelys est resté ouvert sur la table de nuit.. Comme dans un rêve, les pages continuent de se tourner d’elles-mêmes, s’arrêtant juste lorsque Mahelys, endormie sur le lit, bouge dans son sommeil.


« Cette fois ça y est. Je crois que je l’ai enfin trouvé… Il s’appelle Annael, il est grand et bien bâti… on a beaucoup de points communs. Il a lui aussi connu le drame d'Astranaar, on jouait sûrement ensemble dans les ruelles de la cité, ça remonte à si longtemps... enfin, il aime s’amuser, il n’a pas peur des bars miteux de Hurlevent !

Je n’en pouvais plus des hommes coincés et chevaleresques, il était temps que cet elfe-là tombe sur mon chemin ! Il m'emmène tous les soirs avec sa bande d’amis – un peu rustres, mais bon : ce sont des marins ! Ca finit souvent un peu n'importe comment et on s’amuse comme des fous ..

Il est très loin le temps où je suivais ma formation de soigneuse sans jamais sortir de la forêt.. De toutes façons je ne serai jamais parfaite, ni aussi pure que l’aurait voulu Ada, alors autant profiter de l’instant présent »

Les pages jaunies par les années continuent de se tourner.


« J’ai été envoyée en mission avec Annael pour un mois très loin de l'agitation de la ville, en Féralas. On est partis depuis à peine 8 jours et tout paraît si simple avec lui …

Il m'appelle en souriant sa « gardienne de vie », et c’est vrai que sans mes incantations, son corps serait couvert de blessures, ou pire… Il fonce tête baissée en brandissant une épée encore plus grande que lui, et peu importe l’obstacle qui se dresse devant lui.. Quand on s'en sort de justesse, il me fait un clin d’œil et retourne au combat comme si de rien n’était !

Ce n’est pas du tout comme avec les autres hommes, où ça se limitait à un peu de tendresse le temps d’une nuit ou quelques jours… Avec Annael, ce sont des heures, des journées à discuter, se provoquer, s’enlacer..

D’habitude je suis plus pudique en mission, mais on célèbre simplement notre joie d’être ensemble et ça, personne ne pourra nous l’enlever »

Une feuille parsemée de ratures et de gribouillages..


« Où est-il ?.. Que fait-il ?.... ça fait 6 mois qu’il est parti sur ce bateau…
Si seulement je pouvais revenir en arrière ! J’aurais accepté de prendre la maison du Parc avec lui… il voulait tellement

*mots raturés*

Non.. j’en ai parlé à l'Étoilée et elle pense que j’ai fait le bon choix… je n’aurais jamais pu, c’était un rêve éveillé.

Ça aurait été pure folie, prendre une maison ensemble alors que chacun part en mission aux quatre coins du monde.. Il pouvait me promettre le quartier le plus elfique de tout Hurlevent, ça ne changeait rien : c’était chez les humains et je n’étais pas prête à m’enraciner là-bas … je le ne serai jamais ! Ça mon fiancé, mon ami le plus cher ne l’a pas compris.

Aujourd’hui il vogue sur la Grande Mer avec son équipage, ça fait des mois et toujours aucune nouvelle de lui.. Il collectionne peut-être les conquêtes…..

*une large tâche circulaire ressortant légèrement sur le papier laisse imaginer qu’une bouteille a été posée sur la page*

Le plus ironique, c’est que j’écris ces mots depuis une chambre que je loue.. dans le Parc de Hurlevent !.. »

« L'Etoilée veut s’installer avec moi. Elle veut m’aider, mais on serait trop serrées et elle passerait son temps à me surveiller… Je veux juste de la tranquillité !!

Elle arrête pas de me répéter que je dois reprendre ma formation de Druidesse, retourner à Astranaar – jamais j’aurai la force de voir les ruines de notre ville ! – ou Reflet-de-Lune, que c’est le seul moyen de me sortir de là..

D’après elle, si j’arrivais à « oublier Annaël, et mes bouteilles avec » je pourrais devenir guérisseuse pour l’Alliance : elle a des contacts pour me faire entrer dans une bonne division..
Comment elle veut que je soigne les autres si j’arrive même pas à me soigner moi-même ! Elle est folle. Moi aussi… »

« Le temps défile…. Cela fera bientôt un an que je suis sobre… La plaie n'est pas vraiment effacée, mais au moins le calme et l’harmonie sont revenus en moi

J’ai reçu il y a quelques jours une lettre portant le sceau des Corsaires de Cabestan… Je ne sais pas comment elle est arrivée jusqu’à moi, mais il m’a fallu un moment pour me décider à l’ouvrir.. la peur de faire ressurgir le passé, Annael…

Ce n’était pas lui.., c’était une missive de son capitaine de bord. Il le recherche ! J’ai décidé de partir en voyage à Cabestan pour rencontrer cet homme qui a côtoyé Annael, lui a parlé et a vécu sur le même navire pendant tout ce temps..

J’écris donc cette page de Baie-du-Butin, où mon bateau fait une escale pour deux jours.

Tout à l’heure, en me promenant dans la ville, j’ai fait une rencontre un peu spéciale... Debout sur un pylône du quai, une femme aboyait des ordres sur des gobelins et des humains, à propos de marchandises à charger sur son bateau. Sa voix faisait visiblement l’effet d’un coup de fouet aux oreilles des marins !

Elle m’a impressionnée. En rentrant à l’auberge, un des serveurs m’a dit qu’elle s’appelait Yukimara, qu’elle était aveugle mais qu’il valait mieux ne pas la chatouiller…

Je suis quand-même allée la voir de plus près, quelque chose en elle m’intriguait et je voulais en savoir plus. Elle a dû sentir ma présence, elle s’est arrêtée de « fouetter » ses hommes.. pour finir par se détourner sans un mot… »

Cette fois, comme par enchantement, une seule page se tourne…


« La vie recommence à me sourire ! Le soir qui a suivi notre "rencontre"…., Yukimara est entrée dans la taverne où je dînais. A ma grande surprise, elle s’est dirigée vers la table voisine. Au bout de quelques instants, elle m’a demandé d’où je venais... Elle m’a parlé de son bateau, de ses matelots,… et surtout d’une communauté qui va bientôt ouvrir ses portes à Hurlevent.

Mon voyage sur les traces d’Annael a pris fin avec cette rencontre. Annael.. si je n’ai pas pu le retrouver à l’époque, même avec l’aide de son capitaine, je ne le retrouverai pas plus aujourd’hui... je ne renonce pas vraiment.. si, je renonce à lui… je ne sais pas….

ratures, mots barrés et grand vide, comme si le sujet avait été abandonné

je ne sais pas pourquoi Yukimara est venue vers moi. Son projet a l’air passionnant… On peut en faire naître quelque chose de très beau. Le nom que nous avons évoqué… "Le Concile des Saisons"… a une sonorité particulière.

Je suis rentrée ce matin à Hurlevent pour prendre contact avec les personnes que Yukimara m’a recommandées, les autres porteurs du projet du Concile. »

Le défilé des pages se poursuit. Jour après jour, l'écriture de l'elfe semble s'affiner, les courbes qu'elle a tracées sur le papier devenant progressivement plus harmonieuses que les précédentes... pour enfin se muer en une de ces écritures qu'on ne connait qu'à un certain type de diplomates.

« Parfois, je me surprends à m’imaginer en simple combattante de la Maison de l’Hiver – ensuite le visage de ce « cher » Diwall me jetant ses ordres au visage avec dédain me vient à l’esprit… et le songe éclate comme une bulle de nuage !

La diplomatie au Concile des Saisons, je crois qu’il n’y a pas plus compliqué ! Quatre Maisons avec chacune ses dirigeants et sous-dirigeants, c’est autant de visions différentes des choses… différentes, mais pas forcément complémentaires. Tout le travail de coordination et de communication revient au Printemps, et même si c’est très intéressant, nous avons beaucoup à faire.

Par moments j’aimerais qu’un peu comme dans ce songe, le Concile me voie comme la plus simple des druidesses et me permette de me ranger parmi les membres. Si je pouvais renoncer à ces responsabilités,.. ce ne sont pas les pires, et pourtant elles sont écrasantes.. Si elle savait ça, Etoilée me sortirait une tirade sur la perfection et sur mes devoirs... mais je crois qu'avoir ce genre de souhait est sain et naturel, quand on a quelques responsabilités à assumer. Le tout est de ne pas s'enfuir en courant ! »

Bien plus loin, quelques mots griffonnés

Beaucoup de travail..

Etoilée sombre peu à peu dans le Sommeil.. on ne peut plus revenir en arrière, Halley semble fou de tristesse....

Nos allers-retours entre Darnassus et Hurlevent se multiplient, et en même temps.. je ne l'ai jamais vu s'acharner autant au travail. Ses réactions au chevet de ma sœur m'inquiètent parfois

Le défilé s’arrête un moment sur une page... L'écriture semble pressante, c’est comme si Mahelys avait écrit dans un besoin irrépressible de se confier.


« La Chancelière prépare son départ dans le plus grand secret. Je crois qu’Ilassa a de gros ennuis, ça m’inquiète… surtout qu'avant, son gardien Aradas la protégeait comme son ombre. Et pourtant.. elle l'a rattaché à ma protection depuis un mois maintenant.…

Ça signifie deux choses :
- elle renonce à sauvegarder sa vie, donc à assumer pleinement ses responsabilités au Concile...
- elle demande à son propre gardien de me protéger, parce qu’elle compte me nommer à sa succession !


Je suis allée trouver Aradas il y a quelques semaines. Il m’a montré une lettre qu’Ilassa lui avait donné et m’a fait promettre de n’en parler à personne. Dans cette lettre, Ilassa a inscrit noir sur blanc ses intentions de me nommer future chancelière du Concile… ça m’honore à un point inimaginable, mais ça ne m’enchante pas …..

Sans Ilassa, je ne sais pas ce que le Concile deviendra. Je ne pourrai jamais accepter ces responsabilités, je n’ai pas les épaules assez larges, même avec Aradas à mes côtés.



Aradas, un elfe grand et puissant, protégeant maintenant ma vie et mes pas comme une ombre, toujours là près de moi. Un homme froid et distant.. prenant de haut alliés et ennemis..

Son visage. Ses traits sont marqués par les années ; avant aujourd'hui il avait toujours refusé d'enlever son casque, et je ne suis pas sûre qu'il ait laissé d'autres personnes le voir depuis très longtemps… Cette marque de confiance m'a profondément touchée.

Son corps. Couvert de cicatrices, parsemé de tatouages que je n'ai pas réussi à déchiffrer, il est taillé à la fois pour les combats… et pour l'amour !

Ses mains.. elles ont enlevé tellement de Vies, et pourtant elles se sont révélées magiques, d'une infinie tendresse.. le temps d'une nuit.

On aurait peut-être pu s'aimer, il m'aurait réappris ce sentiment-là, et la vie cote à cote… Deux chats bleus paressant dans les ruelles et sur les toits de Hurlevent, jusqu'à la fin de leurs jours… mais il y a le Concile



C'est impossible,.. je manie la plume, non l’épée. Je soigne les autres, n’enlève pas la Vie, ne blesse pas… Pour me défendre, je ne sais que cracher comme un chat et donner quelques coups de mes « petites griffes inefficaces » !

Ilassa est une battante, elle tient le Concile d’une main de fer et je ne saurais pas… il est clair que sa place sera l’objet des convoitises de plusieurs autres officiers… Halley, Pethunia,… tous pourraient, et ne pourraient pas…

En fait, toutes ces histoires de lutte pour le pouvoir… me tombent dessus, et me sont étrangères »

[edit HRP : je reprécise quand-même qu'à moins que quelqu'un ne se soit introduit dans la tente de Mahelys ou qu'on ne lui pique son journal, personne n'a jamais eu accès à toutes ces informations d'un point de vue RP !]

De nombreuses pages se tournent encore et encore. Elles contiennent des intrigues que les mains invisibles qui donnent maintenant vie au journal de Mahelys ne semblent pas vouloir montrer. Nouvelle pause…

« Tandis que la bataille silencieuse pour le pouvoir fait rage dans ma Maison, j’ai enfin pris le temps d’avoir une vraie discussion avec l’ami de ma petite Lou. C’est un collègue de l’Automne que je souhaitais mieux connaître, Heldadras. C’est un elfe un peu sauvage, comme crispé par ce monde d’humains dans lequel il nous faut vivre, nous faire une petite place en attendant de retrouver nos origines.

Heldadras m’a présentée à Tyras, un elfe Daendil. Ca fait très longtemps que mon esprit m'attire vers ce clan. Je pensais qu'il ne s'agissait plus que d'une légende, un mythe. A ma rencontre avec Tyras, j’ai trouvé plutôt étrange que ses cheveux soient du même vert clair que les miens ! Mais finalement, ce n’était sûrement qu’un hasard. Le courant est très bien passé entre Tyras et moi, et même si nous avons peu de temps pour nous voir, nous sommes devenus complices.

Autour des délicieux thés qu’il prépare, nous discutons de notre passé, des nouvelles du monde, de la pluie et du beau temps… Il fait aussi souvent allusion à son clan ; il l'ignore mais quand il en parle, je l'écoute de tous mes sens.

J’ai repensé à mon père… Je m’en souviens si peu, mais tout de même, un Druide aux cheveux vert foncé … Il avait peut-être un lien avec ce clan, lui aussi.. ça expliquerait bien des choses …. »

« Une joie intense m’emplit le cœur ce soir !… J’ai rencontré l’elfe à qui je voulais parler depuis de nombreux mois : l’actuelle matriarche du clan Daendil, Merende.

Nous avions échangé quelques lettres, déjà. En début de soirée, exactement comme Tyras me l’avait indiqué, Merende m’attendait à quelques pas du Puits de Lune de Hurlevent ; il a évidemment fallu que j’arrive en retard….

Elle était assise dans l’herbe à la manière elfique ; une aura de sérénité se dégageait d’elle, je la voyais et la verrai probablement toujours plus lumineuse que les autres elfes. Seules ses mains semblaient parfois scintiller très légèrement d’une nuance vert émeraude. Peut-être que ce scintillement apparaissait quand elle avait une émotion, car elle m’a semblé à fleur de peau. Il s’agit de la même nuance - en plus pâle - que celle qui commence à apparaître dans mes paumes, uniquement lorsque je soigne.

Un très grand elfe se tenait debout derrière elle, légèrement en retrait. Il m’a surprise : il était très impressionnant, il dégageait une grande force. Pourtant, quand je suis arrivée face à lui, il s’est incliné et derrière ce casque j’ai ressenti une sorte de respect mêlé à une indifférente soumission. Paradoxalement, j'ai ressenti une sorte de tendresse pour lui. Merende me l'a rapidement présenté, il s’appelle Cënëdril ; il est resté stoïque pendant quasiment toute la rencontre, murmurant juste quelques mots à Merende à la fin de l’entretien.

Je leur ai raconté mon histoire, expliqué que j’étais presque sûre que mon père était un Daendil et pourquoi. Merende m’a parlé d’un très ancien elfe Daendil. Elle m’a dit que peut-être en me rencontrant, il pourrait me dire s’il avait connu mon père. L’ancien hiberne dans une caverne de la forêt d’Orneval, et lorsqu’il se réveillera, elle me fera signe.

Merende m’a paru jeune, sensible. Mais aux premiers mots qu’elle a prononcés, j’ai compris pourquoi elle portait le titre de "Naneth". Ce soir, en quelques mots échangés, quelques gestes !.. elle a gagné mon respect inconditionnel. »

[hrp : ce texte a été écrit il y a bien longtemps mis à part quelques remaniements de dernière minute ! Relire les premières impressions de Mahelys, quand elle n'était pas encore vraiment liée au Clan, est assez surprenant !]

« Plusieurs jours ont passé depuis ma rencontre avec Merende… je suis sans nouvelle. Étoilée dort toujours profondément, j’aimerais tellement lui raconter ce qui se passe ! Je me rends régulièrement à l'enclave cénarienne de Darnassus, pour m'assurer que sa meute va bien. Comme une mère raconterait une histoire à ses enfants, je leur conte les dernières nouvelles, assise au milieu d'eux.

Et si l’ancien ne se réveillait jamais, emportant dans ses rêves le secret de nos origines ?… Non, je préfère ne pas y penser..

En attendant, je me plonge dans le travail, au Concile. Ilassa a réuni quelques diplomates du Printemps avant-hier. Elle voulait me nommer officiellement à sa succession ; j’ai enfin réussi à lui dire que je refusais, et je lui ai donné la raison de ma décision. Ainsi, nous serons normalement 3 à gérer notre Maison lorsqu’Ilassa s’en ira… J’espère que ce jour n’arrivera pas. »

« J’ai rencontré l’ancien !… Merende et Chysië l’appellent « Idhren », ce qui signifie « sage » en ancien elfique. Quel vieux grincheux ! Je ressens maintenant une sympathie mêlée de respect pour lui… mais ça n’a pas été immédiat ! Merende est venue me chercher en fin d’après-midi, l’ancien hibernait au fin fond d’une grotte, à Orneval…

Il m’a tripotée – car il est presque aveugle – comme si j’étais une bête de foire, il a demandé la couleur de mes cheveux à Merende. J’ai essayé de ne pas me débattre… Je n’étais pas fière !.. Merende me rassurait du regard. Elle n’avait pas l’air totalement rassurée non plus !

Nous l’avons appâté avec des fruits frais, et Merende a un peu insisté pour qu’il dise quelque chose… il m’a alors appris une nouvelle inespérée… Il a élevé mon père, au clan ! Ils l’ont tous cru mort lors d’une bataille, avant l’attaque de leur camp par des ogres.

Il m’a dit que mon père s’appelait à l’origine « Shanrië »... qu'il avait été le favori d'une grande druidesse du Clan avec qui il a eu beaucoup d'enfants... Merende a prononcé un nom, "Cënëdril". Ces mots seront gravés dans mon écorce jusqu’à la fin de ma vie. Je n’avais plus été aussi émue depuis longtemps….

Ma sœur et moi avons donc du sang Daendil… ce qui explique la couleur de nos cheveux.

Naneth ne m’a pas demandé de quitter le Concile des Saisons… elle me laisse libre de décider. Le Concile dépérit… les autres officiers voient bien que je m’éloigne de plus en plus leurs affaires… du moins j’espère qu’ils s’en rendent compte, parfois je doute… la salle des diplomates est un vrai capharnaüm, j’ai fini par aller installer mon bureau au calme, dans une auberge du Bastion de Pennelune. Ça me coûte beaucoup de m’éloigner d’eux, après tout ce qu’on a construit… Mais ils le cherchent ! Autant dire que j’ai déjà un pied chez ceux qui ont le même sang que mon père, ma famille »

« Ah, la taverne des Daendil..
j'y suis souvent en chat, couchée en boule dans mon coin de fauteuil, comme toujours… j’adore somnoler et ronronner, à l'abri des coussins, près du feu de la grande salle.

Hier, j’ai vu un lion noir entrer dans la taverne, magnifique, majestueux, suivi de près du reste de sa meute… et du maître, un elfe aux cheveux blancs, un chasseur visiblement. J’ai bien regardé son visage… des traits marqués, des iris couleur d’or. Une longue vie derrière lui… dans son regard, une lueur un peu sauvage, comme si être parmi tant d’êtres « civilisés » était contre sa nature.

Il m’a plu… je ne pensais pas que ça m’arriverait encore.. enfin. Comme si c’était un signe, son lion noir est venu me voir une seconde, il m’a reniflée - comme Idhren l'a fait il n'y a pas si longtemps !.. - m’a léché le museau et est reparti aussi vite qu'il était venu ! Croquer l’instant présent ?… je préfère attendre d’avoir tous les paramètres, tapie comme une.. lionne »

« J’ai rejoint le clan définitivement depuis deux semaines… Comme s'il y avait eu une balance, le Concile tout entier s’est littéralement disloqué ce soir-là…. La chaleur immédiate qui m'a enveloppée à mon arrivée au camp m'a aidée à me dévêtir de mon tabard et de mes fonctions.. pour revenir à une vie plus simple, plus saine.

Je commence seulement maintenant à me défaire de la culpabilité, d’autant que Madyassa était partie juste après.

Ma sœur m’aide à passer ce nouveau cap… elle s’est enfin réveillée ! Elle sort peu à peu de son sommeil… quand elle sera rétablie, je l’amènerai au camp pour qu’elle vienne vivre avec moi, dans notre famille retrouvée.


J’ai revu le chasseur à la taverne, il s’appelle Kathryl… mais je n’irai pas le voir. Il y a quelques jours, alors qu’il était installé à une table, une jolie elfe aux cheveux violets est entrée comme une tornade et s’est assise sur ses genoux en minaudant ! Un peu comme je fais parfois avec Cenedril - même si au début ce n'était pas vraiment naturel. Kathryl... avait alors l’air un peu dépassé. Mais s’ils sont ensemble, je n’irai pas m’interposer.

En observant mieux, j’ai vu que plusieurs autres hommes étaient aux petits soins avec cette elfe… même Cen parfois ! Elle a un petit côté femme-enfant, à la fois sensuelle et innocente.. Son joli visage, ses gestes gracieux – quoiqu’un peu maladroits par moments, mais je pense que ça ajoute à son charme aux yeux des hommes – et ses longs cheveux... je comprends le choix de Kathryl.
Ça ne m’empêche pas d’avoir un petit pincement au cœur quand je le vois entrer. C’est complètement idiot et ça m'agace… D'habitude c'est moi qui les choisis ! J’espère que ça passera vite… et en même temps.. ce sentiment qui m’envahit toute à la vue d’un homme est assez délicieux »

« Un feu brûle en moi depuis quelques semaines… un sentiment nouveau qui me fait tout oublier, la fuite d'Astranaar, le vide laissé par la disparition d'Annael, le son cristallin des glaçons tombant au fond de mon verre encore et encore, les nuits confuses qui suivaient les soirs vaporeux, le souvenir amer du Concile, les désillusions. Un plaisir aigre à voir émerger du sang, le sentir, voir ceux qui nous massacrent tous les jours… être tués à leur tour

C’est absurde ! Jusqu’ici, je restais loin des combats, essayant d’insuffler de la vie à ceux qui en avaient besoin. Depuis quelque temps, j’accompagne des guerriers sur les champs de bataille ; tandis qu’ils tuent orc sur troll, je les soigne. Je prends aussi toute leur haine, toute leur fureur meurtrière et je ressens les vies qu’ils ôtent.

Ça fait mal… mais c’est si enivrant ! Le temps d’une bataille je n’appartiens qu’aux guerriers qui m’entourent, mon énergie passe en eux, leur rendant la vie qui s’écoulait d’eux. S'en rendent-ils seulement compte ?
Oh, et je n’ai plus besoin de prononcer de mots, lever les mains suffit, quelque chose change : tout est plus naturel. »

« Des choses se passent… Peut-être qu’à force d’observer la vie autour de moi, je me fais des idées… Comme pour m'en débarrasser, je les écris une fois pour toutes

J’ai l’impression de voir Khâline papillonner autour de Cënëdril, et lui qui avait toujours été attentionné avec elle, il devient ours en peluche quand elle entre !
Personne ne semble le remarquer… Cënëdril a tellement changé ces derniers temps.. Hier, alors qu’on devait retourner combattre ensemble, il m’a dit « j’en ai assez ! » et il est parti.. en rentrant de combat, je suis tombée sur lui dans les rues de Hurlevent. Khâline était avec lui, il la recouvrait d’un regard que je ne lui avais jamais vu. D’instinct, et surtout de peur de déranger, j’ai fait faire demi-tour à mon tigre. Je suis inquiète, ça ne me dit rien de bon pour lui !

"Mon" chasseur continue de venir à la taverne, je l’observe toujours en silence, au milieu de toute cette vie dans une seule pièce. Il n'est donc pas pris par Khâline.. J'allais me résoudre à enfin aller vers lui !… mais il y a quelques jours, ma sœur m'a raconté avoir vu une Laerin du Clan l’embrasser sous ses yeux, à la taverne ! Je crois que c'était Galadrinn … J’aurais préféré ne rien savoir… je me suis énervée contre Étoilée, et elle… elle n’a rien dit, elle m’a laissée vider ma peine….

Hier encore, en allant servir du café, j’ai surpris entre Kathryl et Galadrinn des regards qui ne laissent planer aucun doute. Galadrinn manque ses gardes au campement, rêvasse… C’est .. assez difficile, j’essaie de ne rien montrer, je ne m’interposerai pas

*ratures… rageuses*

J’ai trouvé des fioles remplies d’un liquide que j’ai eu l’imprudence de goûter.. quelques heures après, j’ai fait un cauchemar.. notre clan était sauvagement décimé… c’était terrible ! J’avais l’impression de revivre le drame d'Astranaar, vieux souvenirs chassés et enfouis …..

Dans ce cauchemar, Galadrinn tentait de m’aider à fuir… Et cet après-midi à la taverne, pour une raison qui ne me revient pas, elle a attrapé mon bras.. exactement comme elle l’avait fait dans mon rêve.
C’est un détail.. mais je pense que ça n’est pas arrivé au hasard ; ça m’a rappelé que je dois protéger Galadrinn comme elle me protègerait elle-même »

« Galadrinn est jeune, elle a déjà trop souffert de cette disparition… avec Kathryl, ça a l’air d’être un peu plus qu’une passade, elle semble heureuse à nouveau… elle sourit.. d’ailleurs j’ai l’impression que tout le monde au Clan a un sourire béat accroché au visage ….

J’ai revu Jiriki, il était à la recherche de Dae – mais il n'a plus l'air d'en souffrir, je crois qu’il accepte d’avoir une femme légère comme la brise ! Ils ont l’air bien ensemble, quel soulagement de les voir maintenant comme ça. C’est une bouffée d’air pur quand je peux voir l’un ou l’autre. La petite demi-elfe a de la chance d’être tombée sur eux !


J’ai confié à Jiriki l’une des fioles qui avaient engendré ce cauchemar l’autre jour. Depuis le jour où cette eau luminescente est entrée en moi, j’ai l’impression d’être affaiblie..
Hier, je me suis réveillée joue contre terre au beau milieu du campement, en tenue de combat.. j’ai essayé de me relever aussi vite que possible pour que personne ne voie une hîlneth dans cet état.. mais mon corps était aussi lourd que s’il portait une armure de plaques. J’ai senti le regard inquiet de Nightdam et Cënëdril quand ils me demandaient si tout allait bien.

Étoilée m’a emmenée voir un alchimiste à Darnassus. Il m’a examinée et nous lui avons montré la fiole bleue... Il n’a pas semblé de comprendre ce que c’était, mais il nous a interdit d’y goûter à nouveau »

« J’avais vu juste au sujet de Khâline et de mon frère, et je n’ai rien dit… S’il s’était agi d’un autre Rhîwin, tout aurait été bien différent.. je le vois heureux, il le mérite comme n’importe quel autre homme.

Bientôt Naneth verra ce qui se passe. Depuis quelques jours, elle semble… désorientée, je la sens devenir aussi vulnérable que les gangrelotus fragiles et froissés que je trouve parfois enroulés autour d’une autre fleur.

Kathryl est venu me trouver jusqu’en Nagrand… Il m’a demandé ce qui m'arrivait, il a voulu en savoir plus et je lui en ai dit trop… Mais très vite la conversation a dévié sur notre inquiétude pour Naneth, je crois qu’il voudrait l’aider autant que moi.. que pouvons-nous faire ?
J’ai essayé de faire abstraction de mes sentiments… Nous en sommes arrivés à la conclusion que pour que Merende aille mieux, il faudrait que son amour perdu revienne… mais nous n’avons aucun nom, aucun visage à chercher, nous ne savons pas qui est cet homme que Naneth a dû aimer de toutes ses forces… et qui n’est plus là pour elle. Kathryl semble savoir plus de choses sur elle encore, mais là, nous sommes dans l'impasse.

Nous ne savons rien et nous assistons tous deux au terrible spectacle de Merende perdant ses pétales un à un… complètement impuissants »

« De lourdes confidences dévoilées à l’abri d’une vieille maison humaine, voilà à quoi se résume ce début de nuit… Assise entre la belle druidesse et mon frère, je les ai écoutés me parler, ils avaient besoin de se confier à quelqu’un, je crois… se décharger un peu de leur fardeau. Ils m’ont appris deux choses … deux choses peut-être merveilleuses, mais surtout, lourdes de conséquences pour ceux qui y sont liés

J'étais face à une grande détresse, que faire pour eux ? Cënëdril voudrait tout dire à Naneth, quelle est la meilleure solution ?

Mais que nous arrive-t-il ? »

« Deux jours de vol… Aucune trace de Naneth, ni de Cenedril. Peut-être devrais-je chercher du côté de Tanaris, ou des Tarides… j’irai voir demain. Besoin de repos… Ce n’est pas le moment.

Mon plumage change peu à peu de teinte, j’attribue ce phénomène à l’angoisse qui me taraude pendant mes longues heures de vol.

Quand je suis trop fatiguée, je déploie mes ailes de toute leur envergure, et je me laisse aller à planer dans les courants aériens. Alors je n’ai plus qu’à scruter le sol et les airs, en priant les esprits pour qu’un indice arrive, aussi infime soit-il…

Je sens que nous sommes plusieurs à parcourir les terres et les airs dans le même but. Nous retrouverons Naneth, le Clan va aller mieux »

« Cette nuit, je suis passée au camp.. j’avais besoin de sentir vivre « mes » Daendil avant de reprendre les recherches. Je me suis posée sur le toit de l’une des tentes et me suis tout de suite sentie mieux une fois perchée là, tout près des miens !
Le mot « Naneth » s’est alors mis à résonner en écho dans le camp…

Merende était bien là, assise près du feu … Yijael et Shandara la soutenaient. Elle m’a parue si frêle, si… perdue

Je suis reconnaissante aux esprits de nous avoir envoyé des elfes comme Yijael et Shandara, pour le précieux soutien qu’ils ont apporté. Parfois, l’aide doit venir de l’extérieur, d’un milieu plus ou moins neutre. Yijael, en gardant toujours ses distances avec le clan - quelles que soient ses raisons, permet cela. Shandara aussi, c'est une jeune guerrière encore fraîchement arrivée parmi nous, elle a l'esprit vif et les yeux bien ouverts. Si Naneth lui a accordé sa confiance, je le ferai aussi, comme nous tous


A ce moment, Hiril était assise près du feu elle aussi. Elle accueillait Naneth, la rassurait. Sur leur signe, je me suis posée près d’elles le plus doucement possible ; presque tout le clan était là, aligné un peu en retrait, attendant que Naneth vienne les rassurer.

Shandara a déposé la petite Aerlinn dans les bras de Naneth ; une vive émotion est passée sur son visage fatigué.

Yijael a rapidement voulu s’en aller, j’ai senti une grande détresse envahir Merende… Nous avons demandé à Yijael de ne pas trop s’éloigner, de rester au camp.. je pense qu’il a compris ce qui était en jeu.. car il a accepté.

Et puis malgré sa fatigue, Naneth s’est levée d’un coup. Avec Hiril nous nous sommes regardées, avons échangé quelques mots inquiets et l’avons suivie. Elle est allée parler à tous, Kathryl et Khâline étaient là, eux aussi.

Je n’ai pas vu Cenedril…. L’idée qu’il lui soit arrivé quelque chose m’a hantée toute la soirée, je compte repartir à sa recherche dès que possible.


A partir de ce moment, tout s’est passé très vite.. Idhren s'est réveillé, il a voulu féliciter Naneth d’avoir puni Cënëdril par le fouet. J’ai entendu un murmure parcourir l’assemblée, j’ignore si c’était un vent de protestation ou d’approbation… toujours est-il qu’Hiril a alors pris la parole.

Hiril ne veut plus que nos rhîwins, ni aucun Daendil ne soit puni.. et surtout pas par le fouet. Idhren et elle ont tous les deux débattu pendant de longues heures, une éternité.. au contraire d’Hiril, Idhren ne veut pas de changement au Clan. Pour lui, il faut suivre les traditions érigées par le père d’Hiril à la lettre car elles ont prouvé leur efficacité. Si un rhîwin désobéît, il doit être fouetté.

Mais selon Hiril, les rhîwin ne sont pas des armes, des choses sans âme que nous utilisons comme bon nous semble, ils ont des sentiments. Ça je l’ai bien vu, il est déjà arrivé que Night aie besoin de notre soutien, que Cën me montre son affection. Ce sont des choses très touchantes, nous ne pouvons pas nier.

Chacun campait sur ses positions, il était très difficile de leur donner raison ou tort… Shandara est devenue très pâle, et s’est finalement éloignée pour aller se reposer. J’ai regardé Naneth, ses forces semblaient la quitter peu à peu, elle aussi. J’ai fait un petit signe à Daltheema, et nous sommes allées la soutenir à notre tour. Ce soutien a paru la réconforter, j’aurais tellement voulu faire plus pour elle.. avant
Pendant que je soutenais Naneth avec Daltheema, mes pensées défilaient à toute vitesse… notre Clan a ses coutumes, son identité propre et j’y tiens comme à la prunelle de mes yeux ! Et pourtant… Imaginer mon propre frère subissant le fouet, sous le regard soumis des membres du Clan.. m’est insupportable. Si j’avais été là, j’aurais mis toute ma fierté de côté et demandé à Naneth de me fouetter à sa place, sans hésiter, sans craindre les reproches futurs de Cënëdril. Comme je regrette ! Je m’en veux tellement de ne pas avoir été là ce matin-là …

Tout cela, j’aurais tellement voulu le dire hier soir .. Hiril m’a demandé ce que j’en pensais… mais je ne suis pas objective, j’ai essayé d’oublier cette histoire et j’ai répondu que j’acceptais nos règles.. pourquoi ai-je dit ça ? Hiril m’a souri, elle a lu en moi, elle a compris que je ne voulais pas.. Elle a demandé à Idhren de lui rendre le fouet qu’il tenait, et l’a jeté au feu.
je lui en suis reconnaissante…

Un regard échangé, j’ai aperçu dans les yeux de Khâline le même genre d’émotion. Si seulement Khâline était acceptée comme l'une des nôtres ! Le Clan retrouverait son calme. Hélas.. ce n’est pas si simple. Je crois que la fuite de Naneth pendant ces deux jours… signifie beaucoup de choses »